Ahmed et nous ( Jacques Lewa)

Ahmed et nous. D’abord l’homme politique que nous avons admiré de loin. Et ce en dépit des positions qu’il a pu avoir. Les interventions fréquentes sur les médias internationaux en faveur de l’ex chef de la junte, le capitaine Moussa Dadis Camara. L’homme aux cheveux longs sur les plateaux télés en Europe qui osait défendre bec et ongle la position du CNDD dans une transition avec ses problèmes. Mais comme il nous l’a dit un peu plus tard, ce fut un choix assumé. Et lorsqu’il rentre enfin, il travaille au sein de l’opposition. Apparemment et ce n’est peut-être plus un secret, le Kôrô n’a jamais voulu être des côtés calmes et doux.

Ahmed participe donc aux manifestations politiques, comme tous les partisans et leaders de l’opposition républicaine. D’abord pour aller aux élections communales et exiger ensuite que la limitation des mandats soit respectée. Nous avons donc été l’interviewer et l’entendre critiquer. Nous avons été le rencontrer et admirer sa façon de communiquer sur la politique guinéenne. Nous avons été le voir pour comprendre ses prises de position et changement de partis politiques. De l’UPG de feu Jean Marie Doré en crise, au parti GRUP de Papa Koly Kourouma. Que dire, il aurait bien pu et c’était facile, rejoindre le RPG arc en ciel, mais comme nous l’avons dit, Kôrô Ahmed aime le feu. Même lorsque Papa Koly va bénéficier d’une promotion et rejoindre la majorité présidentielle, il restera du côté qui lui réserve la liberté de dire ce qu’il pense de la gouvernance.

Ahmed, c’est aussi des larmes. Il pleure des morts des manifestants devant des militants de l’opposition républicaine et dans le studio des GG en tant qu’invité. Ce jour-là, tous les chroniqueurs qui n’avaient pas compris le message qu’il voulait livrer, s’apprêtaient à lui poser d’énormes questions. Mais le Kôrô pleurait déjà, avant d’annoncer son départ de la politique.

Quelle audace ! Lui et Lamine décident de faire ce qui n’a jamais été tenté en Guinée. Voire en Afrique. Amener un politique dans une émission d’informations. Disons, faire d’un politique, un chroniqueur des grandes gueules. Ils l’ont réussi avec brio. Tenez ! Il arrive au moment où le groupe était en difficulté. Ahmed qui aimait les défis et les problèmes, s’est installé. Et même nous qui avions des réserves, avons fini par leur donner raison. Ahmed, sa voix, ses mots, son ton, sa détermination à briser les codes, ont permis à cette émission phare de poursuivre sa marche, malgré les difficultés d’un certain moment.

 

Ahmed et nous. Un grand frère qui accepte de se mettre au niveau de ses jeunes frères et même neveux (pour certains d’entre nous), pour avancer ensemble. « Petit frère, je n’aime pas ça. Petit frère, ça j’adore. Ohhh, petit frère, je sais que tu as raison, mais N’fatara,… », sa façon de chahuter avec tout le monde. Lorsqu’il n’aime pas, il le dit. Lorsqu’il est affecté il pleure. Il a eu des contacts que bien de journalistes ne disposent pas. D’ailleurs il aimait souvent rassembler chez lui, pour un dîner : politiques, journalistes, hommes d’affaires et cadres de l’administration. Tous, ses amis de tous les âges, de tous genres et de toutes les couleurs. Adieu Kôrô Ahmed.

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