L’Ethiopie a reconnu mardi que des forces pro-gouvernementales avaient tiré sur une équipe de l’ONU au Tigré, déniant fermement un accès « sans restriction » des humanitaires à cette région du Nord du pays privée d’approvisionnement après plus d’un mois de conflit.
Les Nations unies et les organisations humanitaires se disaient mardi de plus en plus ouvertement inquiètes de la situation au Tigré, où l’ONU avait indiqué avoir obtenu un accès un accès humanitaire « sans restriction » en vertu d’un accord avec les autorités d’Addis Abeba annoncé la semaine dernière.
Le porte-parole de la cellule de crise gouvernementale pour le Tigré, Redwan Hussein, a confirmé ce mardi qu’une équipe de l’ONU avait essuyé des tirs et avait été arrêtée dimanche dans cette région. Mais les travailleurs humanitaires seraient à la faute selon le gouvernement.
« Certains des membres des équipes de l’ONU ont été arrêtés et certaines se sont fait tiré dessus. Mais pourquoi est-ce arrivé? Ce pays n’est pas un « no man’s land ». Il a un gouvernement, il a des difficultés dans le Nord du pays. On leur a dit « vous ne devez pas vous rendre dans certaines zones », mais ils se sont livrés à une sorte d’expédition aventureuse » a déclaré lors d’une conférence de presse Redwan Hussein, l’un des porte-parole du gouvernement
Selon le porte parole de la cellule de crise gouvernementale pour le Tigré, les travailleurs humanitaires auraient « forcé deux barrages pour se rendre rapidement dans des zones où ils n’étaient pas censés aller« , en violant l’accord mis en place.
« L’accord avec les Nations Unies disait que le gouvernement coordinerait et dirigerait les opérations. Donc lorsque le gouvernement crée un accès pour qu’une action humanitaire ait lieu, alors les Nations Unies peuvent venir. Mais quand on dit qu’une zone n’est pas sécurisée, alors les Nations Unies et les autres partenaires doivent l’accepter » poursuit Redwan Hussein.
Des sources onusiennes à Addis Abeba avaient indiqué à l’AFP qu’une équipe de l’ONU chargée d’évaluer les conditions de sécurité au Tigré avait été brièvement arrêtée après s’être vu refuser l’accès à un camp de réfugiés érythréens. Une des sources avait évoqué des tirs.
« De plus en plus critique »
Le Tigré est privé de tout approvisionnement et d’aide depuis que le Premier ministre Abiy Ahmed, prix Nobel de la Paix 2019, y a envoyé l’armée fédérale le 4 novembre pour en chasser les dirigeants de la région, issus du Front de libération du Peuple du Tigré (TPLF), qui défiaient depuis des mois son autorité.
Près d’une semaine après cet accord et dix jours après que Abiy Ahmed ait décrété la fin de l’opération militaire au Tigré le 28 novembre avec la prise de la capitale régionale Mekele, l’aide humanitaire n’a toujours pas commencé à être acheminée et la situation sécuritaire et humanitaire réelle est inconnue.
L’ONU n’a toujours pas « cet accès terriblement nécessaire » au Tigré, a regretté mardi à Genève le porte-parole du Haut Commissariat au Réfugiés (HCR), Babar Baloch. « La situation humanitaire est de plus en plus critique », a-t-il prévenu, jugeant vital que les organisations humanitaires soient en mesure d’assister rapidement les gens » sur place.
Les Nations unies sont « toujours très inquiètes pour la sécurité des civils en général« , a-t-il poursuivi. « Cela fait un mois que nous n’avons plus accès aux (quelque 96.000) réfugiés érythréens« , abrités depuis des années dans quatre camps au Tigré, a également souligné Babar Baloch: « faute de pouvoir accéder » au Tigré, « nous ne pouvons pas vérifier ce qui leur est arrivé ou ce qu’il se passe là-bas« , quiavait récemment estimé que les stocks de nourriture sur place devaient désormais être épuisés.
Le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres s’est également dit « très inquiet de la situation actuelle au Tigré« , estimant « essentiel de rétablir rapidement l’Etat de droit, de faire respecter les droits humains, de rétablir les services publics et de garantir un accès humanitaire sans restriction« .
Les Nations Unies avaient affirmé avoir obtenu un accès humanitaire « sans restriction » avec les autorités éthiopiennes la semaine dernière. Une affirmation que les autorités éthiopiennes nient fermement à ce jour.
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