Sanctions contre la Guinée : « La diplomatie peut bien jouer son rôle », Jacques Lewa

La communauté économique des États de l’Afrique de l’ouest veut se montrer dure. Elle compte sur des sanctions pour contraindre Conakry à conduire la transition à son goût. Ce n’est pas gagné. Du moins pour l’instant. Dans les trois pays en transition dans la sous-région, les gouvernements veulent se montrer souverainistes. Pas question de se laisser dicter une conduite. Il y a du travail à faire, ils ont pris des engagements devant les peuples, il ne faut donc pas changer de stratégies. Au Burkina, on est passé de la priorisation des actions de sécurisation du pays, à la suspension des activités politiques. Bien sûr que cela ne plaira pas à tout le monde, mais c’est la volonté de la majorité qui comptera.

Pour la Guinée, on est au stade des menaces. Des poursuites sont annoncées contre les organisateurs de la dernière manifestation à Conakry. Ceux qui seront reconnus coupables et qui disposent d’organisations sociales et politiques, perdront leurs agréments. C’est perçu comme une mesure radicale. Mais elle ne choque pas certains politiques qui estiment que le ministre de l’administration du territoire et de la décentralisation était dans ses droits. Oui c’est son département qui délivre les agréments. Il peut les retirer selon un certain nombre de conditions fixées par la loi, dit-on.

La loi est pour nous. Il est par ailleurs difficile de prévoir les conséquences de son application au niveau international. Les Chefs d’État qui sont déjà dans une logique de contestation de la manière dont la transition est conduite en Guinée, n’hésitent pas à profiter pour durcir le ton. Évidemment, ils se montrent plus convaincus qu’avant, que rien n’irait dans le sens souhaité par la majorité. La diplomatie peut bien jouer son rôle. Elle peut bien chercher des amis de la Guinée dans les différents palais, mais elle ne changera pas les réalités.

Il est interdit aux ministres de voyager. Mais ils ne devraient pas y aller comme ils nous l’ont dit. La transition se passe en Guinée et c’est ici qu’ils sont appelés à travailler. Pour ce qui est des comptes à geler, ils disent ne pas en disposer. Les mesures annoncées sont donc sans importance ; si l’on s’en tient à ces réponses données l’année dernière. Mais il faut tout de même mentionner que les ministres ont beaucoup voyagé entre temps. Ils ont tellement voyagé que le Président de la transition a été obligé de leur dire d’arrêter un peu. Enfin, il a parlé de voyages inutiles.

Ce qu’on leur demande est par ailleurs compliqué. Puisqu’ils ont manqué de tact dès le départ, ils risquent de ne pas pouvoir proposer une alternative à leur refus de la reprise du dialogue avec tout le monde. S’ils mettent en avant les conclusions du dernier dialogue tenu à Conakry, ils peinent à rassurer quant à l’exécution des activités convenues avec la CEDEAO. Pas de lisibilité, pas de perspective claire. Ceux qui ont boycotté le dialogue de Conakry pour des raisons diverses, ne s’empêchent pas d’invoquer un acharnement judiciaire. Mais le système judiciaire tend à leur donner raison. Y compris au plus haut niveau.

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