Elles sont des milliers de prostituées guinéennes vivant aujourd’hui en République du Mali. Dans une boîte de la commune IV du district de Bamako, toutes les filles qui ‘’travaillent’’ la nuit sont des Guinéennes. Parmi elles, il y a une certaine Fanta, originaire de Kindia, qui a bien voulu faire un témoignage pathétique sur le calvaire qu’elle vit au quotidien, depuis qu’elle est tombée enceinte d’un homme qui a disparu dans la nature, sans laisser de trace.
Fanta rêvait de devenir une femme battante et responsable après la mort de son papa à Conakry. Sa maman est une fumeuse de poisson et elle est l’aînée d’une fratrie de 3 enfants : un garçon et deux filles. Elle a ainsi pris l’initiative de sortir du pays, suite à une déception dans son premier foyer. Sa maman, fumeuse de poisson de son état, a failli être emprisonnée par une femme à cause d’une dette de 10 millions de francs guinéens. Comme sa mère n’avait aucune possibilité de payer l’argent, Fanta s’est alors engagée à rembourser le montant au bout de 3 mois mais à condition que celle-ci n’aille pas en prison. Pour elle, ce serait une humiliation. C’est comme ça qu’elle a eu l’idée de venir dans un premier temps à Siguiri pour vendre du riz et du jus de gingembre à Kouremalé. Un mois après, au cours d’un affrontement entre Maliens et Guinéens, le petit commerce de la jeune fille a été détruit. Et elle décida de venir travailler dans la capitale malienne.
De la vente à la prostitution !
« Quand je suis venue à Bamako avec une amie, je ne voulais pas me prostituer, car je suis issue d’une famille noble et religieuse à Kandia où mes parents sont imams. Mais dans la maison où j’habitais, chez un Guinéen aussi, il donne sa maison à 25 000 FCFA par jour. Je dis bien 25 000 FCFA par jour, l’équivalent de 450 mille francs guinéens par jour. Comment je peux payer ça, sachant aussi que la date du paiement de la dette de ma mère approche. C’est en ce moment que mon amie Aicha m’a proposé de me prostituer, car je suis une femme de grande taille et très belle, et que j’aurais beaucoup d’argent », raconte-t-elle.
Fanta se lance alors dans la prostitution, à ses risques et périls. Elle sera la cible de tous les hommes qui fréquentent le lieu pendant un bon moment.
« Pour la première nuit, c’était à la gare routière de la Guinée où presque toutes les filles de la commune viennent. J’étais bien habillée cette nuit-là et j’ai eu 50 000 FCFA. Après, mon amie est venue me dire que si j’étais à IBIZA (un night club qui se trouve à Hippodrome, dans la commune II du district de Bamako, ndlr ), j’allais avoir plus que ça, car là il n’y a que des Blancs et des riches. J’ai dit ok. Je me suis préparée pour aller avec mon amie. J’ai croisé un homme du nom de Mohamed. Nous sommes allés derrière le fleuve, dans un hôtel où on a passé la nuit. Le matin, il m’a laissé 150 mille CFA. C’est ainsi qu’il est devenu mon copain. J’ai payé les dettes et j’ai acheté un terrain à Kindia et construit un très beau bâtiment. », explique-t-elle.
Cinq ans après, Fanta se retrouve en grossesse. Ça l’agace, mais elle n’a d’autre choix que d’accepter cette souffrance et de mettre au monde cet enfant.
« Je vis mal ici. Je veux rentrer en Guinée. Cela fait des années que je suis bloquée au Mali. Maintenant, je veux retourner à la maison, à Kindia. Je ne peux plus me prostituer. Je souffre », lâche-t-elle, dépitée.
Il faut dire que ces jeunes dames se sont embarquées pour le Mali, prétextant vouloir chercher à honorer leurs parents laissés en Guinée. Des femmes guinéennes de chambre sont devenues les ‘’bureaux’’ des Maliens. Elles y reçoivent clients pour des passes allant de 2 000 à 5 000 francs CFA, de 15 000 à 25 00 FCFA, selon les positions et les catégories. Parfois, chacune d’elle peut recevoir entre six et dix hommes par nuit. Enceinte, seule, et ayant tout quitté pour cet homme, Fanta dit qu’il fallait bien qu’elle trouve un moyen de se nourrir et de payer chaque jour les 25 000 FCFA pour la location. Pour elle, la prostitution était la solution la plus évidente. « Toutes les filles le faisaient autour de moi. Trouver un mari était renvoyé à plus tard », confie-t-elle.
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